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Récit de vie

Luc Mauger, né le 30 décembre 1953 à Boulogne-sur-Mer (F),
fondateur de l’Association Chaud au Cœur.

rv 1Mes parents sont tous deux nés d’une famille ouvrière, dans le nord de la France.
Ma mère commença à travailler en usine à l’âge de treize ans. Plus tard, elle mettra au monde cinq enfants. Je suis l’aîné.
Mon père, après son Brevet élémentaire et divers emplois, s’engage dans la police. De gardien de la paix, il gravira tous les échelons jusqu’au grade de commandant.

De mon père j’ai hérité sa force de vie et sa persévérance.
De ma mère, sa très grande sensibilité.


rv 2Nous déménagerons souvent. Il y aura toujours à manger sur la table. Nous serons bien éduqués, de manière plutôt stricte. Et nous serons toujours épaulés pour suivre au mieux les programmes scolaires.

Enfant et adolescent, je me révèle être un grand timide, timoré parfois. Je parle peu. On me dit souvent que je rêvasse. En fait, je réfléchis.

A dix-sept ans, tout en continuant mes études secondaires, je débute mon premier boulot : employé des Postes, embauché pour trier le courrier durant les congés scolaires, vacances d’été compris. Une année, pendant deux semaines, je m’octroie quand même un voyage en voiture avec mes deux copains d’adolescence jusqu’au Danemark.

Le bac philo en poche, je m’inscris dans une école de commerce à La Rochelle. Je continue les vacations à La Poste, parfois de nuit, et un été je vais travailler comme manutentionnaire à Londres. Le trajet sera effectué en poids-lourds : je vais alors découvrir l’effervescence qui règne au marché international de Rungis.

rv 3Mon diplôme obtenu, je pars ensuite effectuer mon service militaire. Je me retrouve d’abord à Toulon où j’apprends à manier une arme. Et, un mois plus tard, me voici affecté au Centre d’Expérimentation du Pacifique en Polynésie. Là, je gratte du papier, je m’adonne au sport et je visite quelques îles. Deux jours après mon retour en métropole, je pars direct en Angleterre pour assister un patron d’entreprise spécialisé en export. Je vais séjourner à Londres deux années pleines.

Puis, je rejoins la filiale à Paris où je vais rester quelques mois avant de décrocher, grâce à mon père, un emploi d’agent contractuel de l’Etat à l’étranger, au Soudan tout d’abord, en Inde ensuite. En 1978, me voici alors titulaire d’un passeport diplomatique français, à m’enorgueillir du titre d’Attaché d’ambassade. Je sillonne chaque pays d’accueil de long en large et j’effectue une à deux missions par an en métropole.


rv 4Neuf ans après, je démissionne. Entre temps, je me suis marié. J’ai surtout envie de réaliser mon projet d’enfance de naviguer en mer à la voile. Pendant deux années, je vais donc être un bricoleur-amateur assidu sur une coque en aluminium que je ne vais pas en fait terminer. Je fatigue. Le budget explose. J’ai aussi l’opportunité de devenir skipper-capitaine d’un voilier de vingt mètres appartenant à un milliardaire. Le bateau initial est alors vendu. Et huit mois par an, je navigue depuis le port de Cannes vers la Corse, la Sardaigne voire la Grèce. Un jour, bien maladroitement, je dis au propriétaire qu’on ne peut pas m’acheter. Au retour d’une croisière, lors d’une tempête, je ne gère pas bien la navigation au goût des passagers. Bref, après deux années de bons services, je suis viré. Vient alors une période de chômage. Dans le même temps, mon épouse obtient le divorce. Me voici déstabilisé : je crise et je m’installe seul à Nice.

Unique échappatoire que je trouve : me purifier le corps. Pendant plus d’une année, je vais m’alimenter principalement de riz, de champignons et d’olives. Je reprends également des études universitaires en sociologie. En complément, je suis une formation privée en somatothérapie.

rv 5Et à l’âge de quarante ans, je m’installe en Gironde, comme formateur en approches psychocorporelles. En ville d’abord, j’aménage ensuite dans un hameau perdu en forêt landaise. L’activité professionnelle va bon train. Les stages proposés pour adultes sont nombreux. Je complète aussi ma formation personnelle à la faculté de psychologie de Bordeaux II.

Sept années après, début 1999, je ressens une lassitude et une asthénie qui commence à poindre. Je préviens alors les stagiaires et autres intervenants que je souhaite arrêter mes activités à la fin de l’année. Ceci fait, me voici seul, isolé dans les bois, dans une maison de pierres : une toute autre expérience, à écouter le silence parlant de la nature.

Bien m’en a pris d’ailleurs car depuis de longs mois, des ganglions surgissent sous la peau. On me diagnostique alors un cancer. Et curieusement, je reste calme. J’ai la trouille certes mais ce n’est pas le désespoir. Incidemment, sans que je ne m’en aperçoive, c’est plutôt la dépression qui s’installe.

 Après biopsie et radiothérapie, je suis devenu filiforme mais je continue de retaper ma maison et défricher le terrain. Et régulièrement, je m’observe être en état de contemplation.

Mais en 2003, ça se corse : c’est la rechute. On me propose chirurgie et chimio : je refuse.


 

Il est temps de procéder autrement. J’effectue quelques retraites monastiques. Je vends ma maison. Je donne mes brebis à un berger bio. Et je rejoins la région parisienne, à Chatou.
Là, je préfère ne pas rester sans rien faire. Je choisis donc de me former en pédagogie alternative dans les écoles Steiner-Waldorf. Pas pour enseigner plus tard mais pour appréhender toujours et encore plus l’altérité, en interaction avec les enfants et les ados cette fois-ci. J’obtiens également un master en Sciences de l’éducation à l’université Paris VIII.
rv 6Entre-temps, l’été 2004, affaibli, je décide de partir en Thaïlande, suite à l’invitation d’un ami bodhisattva. Là-bas, tourisme et fêtes aussi jusqu’à ce que je préfère plutôt méditer dans un monastère bouddhiste perché sur une colline. Je vais ainsi terminer mon séjour habillé de blanc et pieds nus.

Et fin 2004, j’accepte enfin une chimio dite douce dans une clinique, à raison d’une perfusion par mois pendant deux ans et demi, un casque congelé sur le crâne pour éviter la chute des cheveux.

En 2007, me voici enfin remis, la dépression terminée. Et plutôt que de reprendre une activité professionnelle, à hésiter aussi entre devenir ermite laïc en montagne ou moine bénédictin en clôture, je décide en fait de poursuivre des études dans la spécialité qui m’interpelle : la religion.

Je trouve la formation adéquate à l’université de Louvain-la-Neuve. Je m’installe donc en cette ville et souhaite louer une chambre dans un séminaire. L’accord m’est donné. Je côtoie alors abbés, séminaristes et étudiants divers.

De la théologie, je glisse ensuite vers l’anthropologie : un travail de terrain qui me permet de rencontrer et ermites catholiques et ermites bouddhistes.

Ce faisant, en 2013, juste avant mes soixante ans, j’obtiens mon doctorat, après avoir rédigé ma thèse dans un monastère.

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Après plusieurs mois de vie à Paris, me voici de nouveau en Belgique, plus précisément au port de Liège car je passe la plupart de mon temps sur un bateau.

Au niveau écriture, la maison d'édition Imago a accepté de publier le compte rendu de mon pèlerinage chez les ermites bouddhistes thaïlandais, ouvrage disponible en librairie depuis janvier 2016 (en projet : traduction en anglais). La rédaction du manuscrit descriptif de ma rencontre avec les ermites catholiques contemporains occidentaux a été éditée en janvier 2017. L’analyse des données informatives récoltées sur le terrain a fait l’objet d’un ouvrage complémentaire, imprimé en mai 2017. En juin 2019, sera publié l’ouvrage intitulé « Les ermites bouddhistes thaïs contemporains. Méthodologie et analyse », avec de nombreuses photos. Voir Nos livres .


Dans le même temps, depuis mon arrivée à Liège en 2014, j’ai une activité continue de bénévole dans diverses institutions à but non lucratif. Pendant trois années, j’ai œuvré dans un centre social pour les personnes les plus démunies. Pendant plus de deux années, j’ai investi du temps et de l’énergie au sein d’une association qui va à la rencontre des personnes sans-abri. Dorénavant, depuis septembre 2017, j’accompagne des personnes détenues en visite individuelle ou en animation de groupe.
L’essentiel pour nous est d’instaurer une conjoncture cordiale, généreuse, avec bienveillance et sans attente.

Quant à notre Association Chaud au Cœur  qui accompagne toute personne qui se sent seule et isolée, l’objectif principal est d’insuffler une dynamique positive et constructive pour les années à venir.

En ce qui me concerne, comme prévu de longue date, je laisserai la main à des bénévoles de confiance au cours de l’année 2025 afin de pérenniser notre action commune. Je serai alors âgé de 72 ans. D’autres, avec bonheur, prendront le relais.

 

 

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